La Cour de cassation invalide une convention de forfait en jours et redéfinit l’autonomie
Dans une décision qui résonne comme un avertissement pour les employeurs, la Cour de cassation a statué sur la délicate balance entre les conventions de forfait en jours et l’autonomie des salariés. L’arrêt du 7 juin 2023* (pourvoi n° 22-10.196) vient préciser les conditions d’application de ces conventions et dessine une frontière plus nette entre les exigences de contrôle de l’employeur et la liberté d’organisation du travail par le salarié.
La convention de forfait en jours expliquée
La convention de forfait en jours est une modalité d’organisation du temps de travail qui permet une gestion flexible du temps de travail sur l’année. Elle est conçue pour les salariés cadres et certains non-cadres qui disposent d’une grande autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps. Ce dispositif permet de décompter le temps de travail en nombre de jours plutôt qu’en heures, favorisant ainsi une adaptation du travail aux contraintes professionnelles et personnelles, à condition que l’autonomie du salarié soit réelle et non entravée par des contraintes horaires rigides.
Un précédent judiciaire qui fait jurisprudence
M.[C], un agent de maîtrise dans l’industrie métallurgique, a invoqué une atteinte à son autonomie du fait de contraintes horaires imposées par son employeur. Malgré un statut qui, sur le papier, lui conférait une certaine latitude dans la gestion de son temps, la réalité de ses journées était tout autre : un pointage strict et une présence minimum imposée pour valider ses journées de travail. La cour d’appel de Reims avait déjà tranché en faveur de l’employé, une décision que la Cour de cassation a non seulement confirmée, mais renforcée en soulignant la prééminence de l’autonomie sur les accords collectifs.
Quand l’autonomie est plus qu’un mot
L’arrêt, disponible en intégralité sur le site de la Cour de cassation, met en évidence le rôle de l’autonomie comme pierre angulaire des conventions de forfait en jours. La décision explicite que le fait de soumettre un salarié à une obligation de pointage et à une présence minimale est contraire à l’esprit même du forfait en jours, qui repose sur une flexibilité et une indépendance dans l’organisation du travail.
Une alerte pour les employeurs
Cet arrêt sert de rappel rigoureux pour les entreprises qui emploient ou envisagent d’employer des salariés sous ce type de convention. Il les incite à réévaluer leurs pratiques pour s’assurer qu’elles correspondent réellement à la définition d’autonomie exigée par la loi. Les employeurs doivent prendre garde à ne pas imposer de contraintes horaires qui pourraient être interprétées comme une entrave à l’autonomie du salarié.
Un renvoi pour harcèlement moral
La Cour de cassation a partiellement cassé l’arrêt de la cour d’appel sur la question du harcèlement moral, demandant un réexamen des faits dans leur ensemble. Ce point de l’arrêt souligne l’importance d’une évaluation globale des conditions de travail et de l’environnement managérial, qui peuvent influencer la santé et le bien-être des employés.
L’arrêt de la Cour de cassation n° 22-10.196 est un tournant dans la jurisprudence relative aux conventions de forfait en jours. Il rappelle aux entreprises l’importance de la conformité avec les principes fondamentaux du droit du travail et la nécessité d’une vigilance accrue dans l’application des accords de travail. Pour les salariés, il renforce la protection de leurs droits et la reconnaissance de leur autonomie dans l’organisation de leur travail.
La décision intégrale peut être consultée sur le site de la Cour de cassation, offrant une ressource précieuse pour les avocats et les professionnels des ressources humaines en quête de compréhension des nuances juridiques de ce domaine complexe.
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