Protection des lanceurs d’alerte : adoption d’une proposition de loi
Protection des lanceurs d’alerte : adoption d’une proposition de loi
Le 20 janvier 2022, l’Assemblée nationale a voté une proposition de loi améliorant le niveau de protection et de sécurité des lanceurs d’alerte. Cette proposition modifie le dispositif instauré en 2016 par la loi “Sapin 2” en tentant d’en éviter certaines dérives. Les mesures proposées renforcent également les missions du Défenseur des droits dans le domaine du signalement d’alerte. Quels sont les nouveautés de cette proposition de loi ? Zoom avec Ake Avocats.
Une définition élargie des lanceurs d’alerte
Le premier élément mis en avant dans le nouveau texte concerne la définition des lanceurs d’alerte. Il s’agira désormais de toute personne physique signalant, de bonne foi et sans contrepartie financière directe, des informations sur une infraction, une menace, un préjudice d’intérêt général ou une violation du droit européen ou international. L’ancien texte parlait d’action “désintéressée” du lanceur d’alerte. Cette notion est désormais remplacée par “une absence de contrepartie financière”.
En outre, le lanceur d’alerte peut désormais porter à la connaissance de l’Etat un fait donc il n’a pas eu personnellement connaissance, s’il s’agit d’un contexte professionnel. Cela n’était auparavant pas prévu par la loi Sapin 2.
Enfin, les faits dénoncés pourront concerner une violation du droit ou une tentative de dissimulation de cette violation de droit. Même si elle n’est pas “grave et manifeste”.
Extension de la protection à l’entourage du lanceur d’alerte
Tandis que la loi “Sapin 2” ne prévoyait rien pour l’entourage du lanceur d’alerte, la nouvelle proposition de loi offre une protection adaptée. Il s’agit d’éviter d’éventuelles représailles, à destination des personnes physiques et morales à but non lucratif qui constitueraient l’entourage du lanceur d’alerte.
Cela est d’autant plus important que les proches du lanceur d’alerte sont souvent des facilitateurs dans le signalement. En cela, ils sont encore plus exposés au risque de représailles. Désormais, ils ne seront plus laissés seuls face à cette situation et pourront bénéficier d’une protection.
Une sécurité accrue pour les lanceurs d’alerte anonymes
Avec la proposition de loi adoptée en janvier 2022, les lanceurs d’alerte bénéficient d’une protection accrue dans le cadre de leurs signalements. Ces derniers seront désormais accompagnés par un adjoint qui sera présent en cas de difficulté. La loi instaure un nouveau critère de gravité du danger avant la diffusion publique d’une information sans signalement préalable. Les dispositions prévoient également que les alertes lancées et propres à des informations très sensibles et non classifiées doivent être faites par des canaux (internes et externes). Tandis que l’ancienne loi prévoyait une hiérarchisation dans le signalement, la nouvelle proposition permet au lanceur d’alerte de choisir de signaler en interne (dans l’administration ou l’entreprise) ou en externe (un ordre professionnel ou l’autorité judiciaire ou administrative).
En outre, les lanceurs d’alerte militaires seront protégés selon les mêmes règles que les fonctionnaires civils. Le texte de la proposition de loi doit désormais être voté en commission paritaire en février 2022 avant d’être promulgué.
Vous avez des questions sur la défense de vos droits en justice ? Ake Avocats, cabinet spécialisé dans le droit administratif à La Réunion, se tient à votre disposition. N’hésitez pas à nous contacter.
Lire la suitePropos dénigrants sur Internet : quelle compétence juridictionnelle ?
Propos dénigrants sur Internet et compétence juridictionnelle
Le 21 décembre 2021, la Cour de justice de l’Union européenne s’est prononcée sur la compétence juridictionnelle des Etats à propos d’une action faisant suite à la publication de propos dénigrants sur Internet. Qu’en est-il de la matérialisation des faits et de la compétence juridictionnelle ? Les juges ont considéré que cette action en justice pouvait être divisée entre les différents Etats où les propos sont accessibles. Eclairage sur cet arrêt et son apport important pour la défense de vos droits en justice.
La difficile matérialisation du dommage résultant de propos dénigrants sur Internet
Une entreprise tchèque reproche à une entreprise hongroise d’avoir publié des propos dénigrants à son égard sur Internet. Elle intente une action en France afin de voir cesser ces propos, de retirer les publications et d’obtenir une indemnisation au titre de son préjudice. La question se posait ici de savoir si la juridiction française était oui ou non compétente pour ce type de litige. Cet arrêt soulève la problématique de la matérialité du dommage lorsqu’il est consécutif à des propos dénigrants sur Internet.
En effet, les contenus publiés sur le Web ont ceci en commun qu’ils naviguent dans le monde entier sans limite de territoire ni de temps. En pratique, l’article 7, § 2, du règlement n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 attribue compétence à la juridiction où a eu lieu le fait dommageable ou bien où il risque de se produire. Dans un ancien arrêt rendu en 2011, la Cour de justice de l’Union européenne avait accepté d’offrir le choix au demandeur. Ce dernier pouvait soit solliciter la réparation de tout son préjudice là où se trouve l’émetteur des contenus litigieux, soit saisir la juridiction du lieu où il a ses intérêts principaux.
Une autre possibilité réside dans le fait de saisir les juridictions de chaque Etat membre où il est possible d’accéder aux contenus dénigrants afin de demander une réparation pour le préjudice causé.
Compétence des Etats membres et action divisible des demandes en justice
En l’espèce, la Cour de justice estime que le demandeur est en droit d’engager une action en justice en France pour rectifier les données litigieuses, supprimer les contenus et obtenir des dommages et intérêts. En pratique, le demandeur peut donc se tourner vers toutes les juridictions des Etats où les contenus sont accessibles. Le contentieux se divise donc, voire se fragmente, au bénéfice du demandeur. Néanmoins, les décisions des juridictions ne seront pas les mêmes en ce qu’elles prennent en compte les dommages survenus sur leur propre territoire.
Ainsi, ceux qui estiment qu’une atteinte a été portée à leurs droits à la suite de propos dénigrants sur internet peuvent agir en justice simultanément. D’une part, en demandant la rectification et la suppression des contenus, d’autre part pour obtenir la réparation de leur préjudice. Cette action en justice peut être menée devant toutes les juridictions des pays dans lesquels les propos dénigrants sont consultables.
Vous souhaitez obtenir justice en vous entourant des meilleurs conseils pour défendre vos droits ? Le cabinet Ake Avocats à La Réunion se tient à votre disposition pour vous accompagner à chaque étape.
Lire la suiteRequête en divorce en France et bigamie
Quel sort pour une requête en divorce en France en cas de bigamie ?
Dans un arrêt rendu le 17 novembre 2021, la Cour de cassation a dû se prononcer sur la recevabilité d’une requête en divorce menée en France par l’épouse d’un ressortissant étranger bigame. En l’espèce, l’époux s’était marié à deux reprises en Libye. Dans ces circonstances, et face au conflit de lois entre plusieurs pays, quel est le sort d’une telle requête en divorce ? Ake Avocats vous éclaire dans cet article.
Requête en divorce face à la prohibition de la bigamie en France
En l’espèce, un ressortissant libyen se marie à deux reprises en Libye, avec deux femmes différentes. Sa seconde épouse forme une requête en divorce en France. Les juges considèrent alors que la requête est irrecevable, sur le fondement de la prohibition de la bigamie en France. En effet, l’article 147 du Code civil prévoit qu’il est impossible de contracter un second mariage avant d’avoir dissolu effectivement le premier. Cette règle irréfragable ne peut faire l’objet d’aucune exception. Tant et si bien qu’un mariage célébré en violation de cet article peut être attaqué en justice pendant 30 ans à partir de sa célébration.
Pour autant, cette prohibition doit-elle entraîner l’irrecevabilité d’une requête en divorce en France ? Il faut dire que les conflits de lois se posent souvent en matière de droit international de la famille, lorsque la loi étrangère diffère de la loi française. La Cour de cassation considère de son côté qu’il y a lieu de reconnaître la validité de ce mariage bigame célébré à l’étranger en ce qu’il respectait la loi nationale des époux. La demande en divorce formulée en France doit donc être réputée valable. En partant du principe que les conditions de fond du mariage sont encadrées par les lois personnelles des époux.
Conditions de recevabilité d’un mariage bigame célébré à l’étranger
Dans les faits, la Cour de cassation ne remet pas en question la prohibition stricte de la bigamie. Cependant, si la France considère qu’il est absolument interdit d’épouser deux personnes différentes, elle doit tout de même reconnaître la validité de ces mariages célébrés à l’étranger. Cela si et seulement si le mariage bigame a été célébré à l’étranger en conformité avec la loi nationale des deux époux. En l’espèce, ces derniers étaient libyens. Les juges devaient donc vérifier la législation libyenne afin de s’assurer qu’elle autorisait effectivement la bigamie. Ce qui était bien le cas.
Néanmoins, le fait d’admettre la validité de cette union bigame célébrée en Lybie, sur la base de la conformité du mariage avec la loi personnelle des époux, ne signifie pas que ce mariage puisse produire des effets en France. La reconnaissance de l’union n’entraîne pas la reconnaissance de ses effets par la justice française sur le sol national. A titre d’exemple, lorsque plusieurs épouses prétendent à la pension de réversion après le décès de leur conjoint, la loi prévoit que seule la première épouse dans le temps peut bénéficier de cette pension.
Cabinet d’avocats spécialisé en droit de la famille, Ake Avocats vous accompagne dans votre litige pour défendre vos intérêts en justice face à toute difficulté d’ordre familial.
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