Opposition à un contrôle fiscal et cumul des sanctions
Opposition à un contrôle fiscal et cumul des sanctions
Le 8 avril 2022, le Conseil constitutionnel a déclaré conforme à la Constitution la majoration des sanctions dans le cas d’un contrôle fiscal. Quels sont les contours de cette décision et qu’est-il possible d’en déduire ? Réponse avec Ake Avocats.
Saisine du Conseil constitutionnel et majoration en cas de contrôle fiscal
Le Conseil constitutionnel, saisi d’une QPC par le Conseil d’État le 10 février 2022, devait trancher sur la conformité d’une majoration de 100 % des droits en cas de contrôle fiscal. La question était donc ici de savoir si cette majoration portait ou pas atteinte à la nécessaire proportionnalité entre le délit et la peine. Dans les faits, la disposition litigieuse concernait une majoration de droits en cas de sanction consécutive à l’opposition du débiteur au contrôle fiscal. Cette disposition venait s’ajouter à l’article 1746 du Code général des impôts qui prévoit de son côté une amende en cas d’opposition aux missions des agents de l’administration fiscale. Ce cumul est-il contraire à la proportionnalité entre les délits et les peines ?
Rappelons qu’une opposition à un contrôle fiscal consiste à empêcher le déroulé normal du contrôle fiscal de manière intentionnelle. Concrètement, le contribuable refuse de laisser l’agent entrer dans son entreprise et ne lui remet pas les documents comptables. Il peut même adopter une attitude menaçante ou hostile à l’égard du vérificateur fiscal.
En pratique le Conseil constitutionnel avait considéré le 18 mars 2015 qu’était inconstitutionnel le cumul des sanctions pour délit et manquement d’initié. En 2021, même prise de position pour le Conseil constitutionnel concernant le cumul de sanctions administrative et pénale en lien avec l’opposition aux fonctions des agents de l’Autorité de la concurrence.
Double sanction en cas d’opposition à un contrôle fiscal
Le Conseil constitutionnel, par sa décision du 8 avril 2022, a estimé que le cumul de la majoration en cas d’opposition à un contrôle fiscal était conforme à la Constitution. Ainsi, s’opposer à l’Administration fiscale en cas de contrôle peut coûter très cher. Cela est sanctionné administrativement avec une majoration de 100 % du redressement. Et pénalement avec en pratique une amende pouvant atteindre 25 000.
Le Conseil constitutionnel poursuit son raisonnement en rejetant l’argument de disproportion entre l’infraction et la sanction. Il affirme ainsi que le législateur a souhaité sanctionner tout comportement faisant obstacle au travail des agents de l’Administration fiscale. Cet enjeu poursuit un objectif de nature constitutionnelle, destiné à lutter contre la fraude fiscale. Or, les juges estiment que la majoration prévue n’est pas une sanction manifestement disproportionnée par rapport à la nature particulièrement grave du comportement réprimé.
Les juges ont ainsi conclu que le fait pour un même comportement d’être réprimé par plusieurs incriminations ne constitue pas pour autant une identité de faits. Le fait de cumuler les sanctions pénales et administratives prévues par les articles 1746 et 1732 du Code général des impôts ne contrevient pas aux dispositions de la Constitution.
Spécialisé dans le droit pénal, le cabinet Ake Avocats vous accompagne pas à pas dans la résolution de votre litige. Vous faites face à des sanctions en cas d’opposition à un contrôle fiscal ? Nous intervenons pour vous aider à défendre vos droits, de manière personnalisée.
Lire la suiteRépartition de la pension de réversion : quelques précisions
Précisions sur les règles de répartition de la pension de réversion
Un décret rendu le 25 mars 2022 (décret n° 2022-432) vient préciser les contours du calcul et du versement de la pension de réversion dans certains cas. Plus particulièrement en présence de plusieurs conjoints survivants et divorcés à la mort de l’assuré. Dans cette situation particulière, la pension est attribuée en tenant compte de la période réciproque de mariage et de la somme totale des différents mariages de l’assuré décédé. Comment comprendre ce décret et la répartition de la pension de réversion ? Éclairage dans cet article avec Ake Avocats.
Loi du 24 août 2021 et versement de la pension de réversion
La pension de réversion est un droit indirect garanti au conjoint survivant et qui lui permet de jouir d’une partie de la pension dont était titulaire son époux. La pension est perçue au décès de l’époux assuré, en vertu de la solidarité financière qui existe entre deux époux ayant participé à l’entretien du ménage pendant leur vie commune. Le droit considère ainsi que la vie conjointe a permis de constituer des droits à la retraite et un droit propre indirect pour le conjoint survivant. Cela permet de venir compenser une éventuelle perte de revenus subie par le conjoint survivant du fait du décès de son époux. Il peut ainsi bénéficier d’un revenu d’assistance qui fait office de revenu de substitution.
Conformément au respect des principes de la République, la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 a précisé les contours du versement de la pension de réversion. L’idée était alors de prévoir le paiement de la pension à un seul conjoint survivant, en excluant ainsi le second conjoint survivant de l’époux décédé. Cela, hormis en cas de mariage putatif, autrement dit lorsqu’un époux a été dans l’ignorance d’un vice caché entachant le mariage de nullité.
Pour appuyer davantage les précisions de cette loi, le décret n° 2022-432 du 25 mars 2022 vient prévoir certaines règles de partage de la pension en cas de pluralité de conjoints ou d’ancien-conjoints.
Décret du 25 mars 2022 et pluralité de conjoints survivants
Publié au journal officiel le 27 mars 2022, le décret n° 2022-432 du 25 mars 2022 porte sur les règles de répartition de la pension de réversion en cas de pluralité de conjoints ou d’ancien conjoints. Cela, à la suite du décès du conjoint assuré.
En pratique, le versement de la pension de réversion est assurée par la CNAV (Caisse nationale d’assurance vieillesse) qui tient compte des conditions de ressources du conjoint survivant. Dans les faits, comment cela se passe-t-il en présence de plusieurs conjoints (cas de bigamie) ?
Normalement, la question ne devrait pas se poser puisque le droit français prévoit qu’un nouveau mariage n’est valable qu’après la dissolution du précédent. Il est donc impossible de se marier avec plusieurs personnes et donc d’avoir différents époux. La bigamie est une cause de nullité absolue du mariage en vertu de l’article 184 du Code civil.
Pour autant, ce type d’union existe bel et bien, mise en lumière en droit international et arrivant en France par le gré des migrations. En 2015, les juges de la Cour de cassation avaient reconnu la qualité de conjoint survivant à une seconde épouse, bien que cela viole l’article 147 du Code civil. S’en était suivie pour elle le droit à demander la pension de réversion.
Pension de réversion : nouvelles modalités en cas de pluralité d’époux
Le décret vient préciser les contours du versement de la pension de réversion. Le texte prévoit ainsi que tout mariage contracté en violation de l’article 147 du Code civil donne lieu à un calcul de la pension de réversion selon plusieurs éléments :
- la durée du mariage pendant laquelle le conjoint en question était le seul époux de l’assuré décédé
- la somme totale de toutes les durées de mariage
- le nombre total de conjoints ou anciens conjoints susceptibles de bénéficier d’une pension de réversion.
Ce mode de calcul concerne donc les situations de bigamie, pourtant considérées comme illégales en droit français. De son côté, le décret prévoit que le solde de la pension de réversion doit être répartie entre les conjoints et anciens conjoints respectant le principe de monogamie et au prorata de leur durée respective de mariage.
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Prescription décennale : quel est son champ d’application ?
Quel est le champ d’application de la prescription décennale ?
Dans un arrêt rendu le 12 avril 2022, le Conseil d’État a rappelé que le principe de la prescription décennale s’applique aux ouvrages publics. Plus précisément en ce qui concerne une action menée à l’encontre d’un sous-traitant et mettant en présence le maître d’ouvrage et l’administration. Quel est l’impact de cette décision en droit administratif ? Éclairage dans cet article avec Ake Avocats.
Délai de prescription applicable pour une action en responsabilité dirigée par le maître de l’ouvrage
La question s’est bien souvent posée de savoir quel délai de prescription devait s’appliquer pour une action en responsabilité menée par le maître d’ouvrage contre le constructeur. Dans un arrêt datant du 12 avril 2022, le Conseil d’État a tranché cette question dans le cadre d’une action en responsabilité contractuelle entreprise par le maître d’ouvrage.
En l’espèce, ce dernier avait commandé la construction d’un édifice dans les années 2000. Pour mener à bien cette construction, plusieurs marchés publics avaient été passés. La maîtrise d’œuvre avait été confiée à un groupement qui avait ensuite fait l’objet d’un transfert à un autre groupe. Après plusieurs travaux, des malfaçons sont apparues sur la charpente métallique. S’en est suivie une bataille juridique devant les juges du Conseil d’État. Pour sa défense, la société membre du groupement fait valoir que l’action est prescrite (délai légal de 5 ans).
Le Conseil d’État devait donc statuer sur le délai de prescription de l’action. L’action en responsabilité contractuelle du constructeur vis-à-vis du maître d’ouvrage était elle régie par la prescription quinquennale ou par la prescription décennale ?
Cadre juridique de la prescription en matière d’action en responsabilité du maître d’ouvrage
Pour rendre sa décision, le Conseil d’État est venu poser un cadre juridique au préalable. La prescription quinquennale de droit commun est prévue au Code civil, dans son article 2224. En vertu de cette disposition, l’action se prescrit par 5 ans à partir du jour où le titulaire du droit a eu connaissance des faits litigieux ou aurait dû en prendre connaissance. De son côté, la prescription décennale est prévue par l’article 1792-4-3 du Code civil. Elle concerne tous les travaux réalisés par les constructeurs et leurs sous-traitants. La prescription est de 10 ans à partir du jour où le maître d’ouvrage réceptionne les travaux. En se basant sur cet article, les juges du Conseil d’État confirment le raisonnement du maître de l’ouvrage. Ce dernier pouvait agir pendant 10 ans contre les membres du groupement de maîtrise d’œuvre à partir du moment où ces derniers avaient la qualité de constructeurs.
Point important à souligner : cette prescription de 10 ans concerne également les actions portant sur des désordres n’affectant pas la solidité de l’ouvrage ni le rendant impropre à sa destination. Concrètement, le maître d’ouvrage peut agir contre le constructeur ou son sous-traitant pendant 10 ans, pour tous les dommages. Y compris ceux ne relevant pas de la garantie décennale.
Action du maître d’ouvrage contre le constructeur et application de la prescription décennale
En pratique, deux situations se posent concernant l’action menée à l’encontre d’un constructeur. D’une part il est possible que le constructeur agisse contre un autre constructeur ou son sous-traitant. Dans ce cas, la prescription est de 5 ans, conformément à l’article 2224 faisant référence au délai de droit commun. De son côté, l’action en responsabilité menée par le maître d’ouvrage contre le constructeur ou son sous-traitant est régie par d’autres dispositions. Il ne s’agit plus de la prescription de droit commun mais de la prescription décennale. L’action peut donc être menée pendant 10 ans à compter de la réception de l’ouvrage. Dans ce cas, les juges décident donc d’écarter le délai de prescription de droit commun de 5 ans au profit de la prescription décennale.
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